Faire le deuil de ses vêtements
À l’hiver dernier, lors d’un petit-déjeuner avec une de mes connaissances je me suis confiée. Mon opération étant très récente suite à mon diagnostic de cancer, j’étais préoccupée. Triste, je lui partage que la veille j’ai dû faire un ménage de ma garde-robe et me départir de vêtements que je ne peux plus porter. Elle de me répondre tout simplement : «Bien non voyons c’est juste des vêtements.» Pourtant je comprends, mais en même temps je me sens incomprise.
Ce dessin suit Monique depuis près de 15 ans. «Je ne savais pas qu’un jour cette fille si désemparée m’interpellerais pour des raisons bien précises. Ah la vie… !»
Je n’ai pas fait le tri dans mes vêtements parce que j’ai perdu du poids ni parce qu’ils sont démodés ou usés, mais parce que je suis totalement désemparée. Oh j’ai pleuré devant mon miroir plein pied ce jour-là. Devant mon chat qui se demandait ce qui se passait car, que le lit était plein de vêtements où il s’y «lovait».
J’achevais à ce moment-là mes traitements de chimio, je me sentais très vulnérable et fragile. Alors, je me suis tu… ce que je n’ai pas l’habitude de faire. Il y a des sentiments qui se partagent tellement mieux sur un blogue! Je vais vous décrire ce que j’ai ressenti. Dans ma garde-robe il y avait mes jeans préférés à taille basse, il y avait aussi mes pantalons «corduroy», aussi à taille basse, que je portais avec de jolis petits bottillons. Je me rappelais les yeux que mon amoureux faisait en me voyant les porter.
La confiance en soi c’est complexe, mais je crois que ce sont ces vêtements que je portais par choix, par goût et par plaisir qui m’aidaient à me sentir bien et à la hauteur. C’est important de se percevoir belle et en confiance.
Depuis 12 mois je portais des leggings, des chandails longs, des vêtements qui camouflaient mon sac de stomie, alors que j’avais plus que tout besoin de me sentir belle et en confiance. Je me suis regardé dans le miroir, habillée, déshabillée, découragée, j’ai fait des essais. OK une fille dans un sac de patates, c’est comme ça que je me sens à ce moment- là. Une fille avec un corps camouflé.
Cette prise de conscience m’a allumée, je me suis mise à porter des robes fleuries, des robes amples et virevoltantes, des sous-vêtements affriolants (merci ANA!). J’ai recommencé à porter mes sous-vêtements d’avant la maladie. J’ai trouvé des pantalons avec une bande élastique qui couvre exactement le sac de stomie. J’ai trouvé des robes qui me font me sentir belle et en confiance. J’ai aussi commencé à porter des couvre-sac de stomie en tissus fleuris et ma radio-oncologie m’a même dit : «mais c’est donc bien beau ça!»
Une femme coquette reste coquette avec une stomie.
Mes jeans taille basse? Ils sont encore dans ma garde-robe… Peut-être trouverais-je la façon de les porter à nouveau.
J’ai croisé sur mon chemin au début de ce périple vers la guérison mais surtout vers l’adaptation à ma stomie une personne extraordinaire de générosité qui m’a écrit avant ma chirurgie : «C’est une adaptation, mais ce n’est pas insurmontable.»
…Ce n’est pas insurmontable…
Oh que j’ai pu me répéter cette phrase comme un mantra!
…Ce n’est pas insurmontable…
Me voilà, assise à vous écrire cet article, en vous adressant : «C’est une adaptation, mais ce n’est pas insurmontable.»
Et voilà ! La vie continue. En leggings, en robe, en bikini tout comme l’été dernier ou en pyjama comme bientôt. Faire le deuil de ses vêtements, c’est peut-être aussi faire de l’espace pour la suite. Devine ce que je porte sous ma robe ?...ma vie qui continue!
Présenté par : Hollister