MA STOMIE, MON DEUXIÈME SOUFFLE ; MA NOUVELLE VIE

Je me présente, je suis Geneviève et j’ai 46 beaux printemps. J’ai été diagnostiquée de la maladie de Crohn dès le jeune âge de 5 ans. Fille unique vivant auprès d’une mère victime et d’un père violent… de maux de ventre en maux de ventre, de gastro en gastro, la maladie est devenue ma complice, presqu’une «amie». 

Mes études primaires ont été parsemées de nombreuses visites à l’hôpital comprenant trois opérations soutenues d’une forte médication variant de 6 à 8 comprimés de cortisone par jour. Vous vous douterez qu’avec une telle médication, j’étais plutôt méconnaissable. Un visage tout rond, boursoufflée des pieds jusqu’aux oreilles! Disons que ce n’était pas le temps de courtiser les garçons.  

J’avais un grand retard de croissance, c’est pour cette raison que lors de ma première année du secondaire, pour essayer de me donner un «boost» avant l’adolescence, les spécialistes ont décidé de me gaver. Être gavée consiste à introduire un tube du nez jusqu'à l’estomac et être nourrie 24 heures sur 24 afin de favoriser la croissance. Pour moi, c’était un arrêt total de consommation de nourriture pendant un an pour ainsi mettre au repos l’intestin et me surcharger de protéine. En bref, m’engraisser comme un p’tit cochon de lait! Le tout a fonctionné, je suis passée de 4 pieds à 4 pieds 11 (et si je m’étire, presque 5 pieds) et de 75 livres à 90 livres. J’ai dû recommencer le processus en troisième secondaire, mais pour seulement 6 mois cette fois-là.

Je pouvais boire de l’eau et ma récompense quotidienne était quelques petits bonbons clairs. Bon sens que je les savourais!! Vous devinerez que j’ai passé beaucoup de temps à regarder des émissions à la télévision. Saviez-vous qu’il y a au moins 20 annonces de bouffe par tranche de 30 minutes de programme à la télé? Je le sais, je les ai toutes comptées et je les connaissais par cœur! On s’entend pour dire que le gavage enlève la faim, mais pas l’envie de gouter la nourriture, l’envie de réellement mâcher et de discerner les différentes textures des aliments!

Puis enfin, la vie collégiale est arrivée! Le CÉGEP, la nouvelle vie d’appartement où le calme régnait, ou presque… puisque les maux de ventres, eux, persistaient. Éventuellement, cinq pierres sont apparues sur mes reins en 30 jours. Moi qui ne pourrai jamais avoir d’enfant, il parait que la douleur est aussi violente qu’un accouchement… j’aurai au moins vécu ça!

Finalement, en 1992, je suis partie à Toronto comme «Nanny» (nounou pour les enfants) et je m’y suis trouvée. Restant d’abord dans une famille incroyable où le père était si bon et près de ses 3 enfants et d’une mère fière de sa famille, j’y ai enfin trouvé la paix! Cependant, malgré ces beaux moments, la maladie, elle, persistait. J’ai donc dû prendre la décision de me faire opérer en 1995 pour subir une iléostomie permanente.

Un deuxième souffle, une nouvelle vie….enfin, la liberté de marcher pendant des heures, de nager, de voyager en Italie, à Cuba, puis à Paris en septembre!

Si, à travers mon récit, je peux vous transmettre une certaine sagesse, une certaine lumière, une inspiration, je serai fière car je vous le confirme, savourer la vie prend maintenant tout son sens!

À très bientôt!

Votre amie, 

Geneviève B. 

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